De nombreux indépendants et freelances se tournent vers le portage salarial, car au delà de l’accompagnement que peut leur apporter la société de portage pour faire décoller leur activité, il souhaitent aussi profiter du réseau de consultants qu’ils vont ainsi intégrer. Il convient cependant de revenir sur cette notion de réseau professionnel dont les avantages dépendent aussi du bon vouloir de chacun…
Réseau professionnel : une démarche personnelle avant tout
Une personne me demandait ces derniers mois si dans notre société de portage salarial, nous « mettions les personnes en réseau ». Je fus bien embarrassé pour lui répondre tellement la question me semblait inappropriée au concept. En effet mon expérience personnelle me porte à penser qu’on ne nous met pas réseau mais que cette exigence s’adresse avant tout à nous même.
Bien entendu, une organisation peut mettre ou ne pas mettre à disposition des moyens plus ou moins pertinents permettant de favoriser la mise en réseau de consultants mais ceux-ci ne sont que des contenants et leur richesse sera d’autant plus grande qu’ils seront alimentés par les échanges de ceux qui souhaitent justement se mettre en réseau.
Dans les trois lignes qui précèdent, j’ai le sentiment que tout est dit à propos de cette demande de mise en réseau. Pour autant il ne s’agit que d’un concentré introductif qu’il convient de commenter pour mieux comprendre ce que les mots peuvent cacher.
L’organisation, qu’il s’agisse d’une entreprise, d’une association auxquelles nous appartenons ou tout simplement d’un outil de contacts accessible sur le Web ne serait donc qu’un contenant, le contenu étant constitué par les différents échanges que les individus vont nourrir.
De quoi est-il question lorsque nous parlons de « réseau de consultants » ?
Dans le cas de la personne qui s’adressait à moi, il est clair qu’elle était motivée par le besoin de trouver des missions de conseil. Ceci pose plusieurs questions :
Puis-je trouver des missions au travers d’un réseau professionnel de pairs ?
On trouve des missions auprès des donneurs d’ordres et ceux-ci ne se trouvent pas dans une communauté consanguine mais bien à l’extérieur de celle-ci au sein de micro-cibles de donneurs d’ordres qui vivent « des besoins en tension ». Un réseau de pairs peut au plus être à la source d’opportunités et de contacts pour rebondir. Quand je dis « au plus » c’est parce que ceci ne pourra jamais constituer qu’une infime part du chiffre d’affaires d’un consultant.
Cette vérité que démontre les faits depuis plusieurs années tels que nous pouvons les constater au sein d’ITG prouve que la demande de mise en réseau peut être parfaitement fantasmatique et même quelles que fois l’expression d’un évitement : le réseau est sensé porter tous les espoirs que je fonde, les personnes que je vais (dois ?) y trouver sont en parfaite adéquation avec mes désirs et si ce n’était pas le cas ce serait parce que le réseau n’est pas bon ou mal géré.
Or l’intérêt que nous pouvons nous porter les uns aux autres n’a rien d’évident et ne s’accorde guère avec ce type de postulat. L’échange suppose une rencontre positive à partir de laquelle on envisage comme possible de construire quelque chose ensemble dans l’ordre de la durée ou de l’éphémère.
Comment entrer en contact avec les personnes d’un réseau qui peuvent m’intéresser ou s’intéresser à moi ?
Répondre à cette interrogation dépend du contexte mais il existe néanmoins quelques conseils de base qu’il est utile de se rappeler.
Pour être positive, la rencontre suppose que se produise une sorte d’alchimie qui fixe l’intérêt réciproque sur des motivations rarement rationnelles à l’exemple de la citation de Montaigne à propos de son entente avec La Boétie : « c’est parce que c’était lui, c’est parce que c’était moi ».
La disposition préalable capable de favoriser cette rencontre consiste à ne rien forcer et surtout à ne pas être dans la sollicitation ou la demande qui ont tout pour s’opposer à l’échange. La question n’est pas de traiter de moi mais bien de trouver les points de jonction entre nous. On les trouvera d’autant plus qu’on développera la capacité à s’intéresser objectivement à l’autre. Cette condition préalable est essentielle et pourtant peu respectée. La question n’est jamais « qu’est-ce que je pourrai lui proposer ? ». Ou bien « comment lui proposer ceci ? ». Mais plutôt : « qu’est-ce que cette personne pourrait attendre de moi ? ». Cette recherche vous mettra dans une position d’écoute active favorable à la constitution de liens nouveaux et nombreux au sein de votre réseau.
Existe-t-il d’autres possibilités d’échanges qui méritent que je mobilise une part précieuse de mon temps ?
Plutôt que de prendre la question par le biais de la valeur des échanges, je préférerais lui substituer la force du lien. L’intérêt des échanges dans un réseau consultants sont fonction de la force des liens que nous pouvons construire. Or ces liens naissent, se développent et meurent. Ils ont un cycle de vie et des moments d’intensité. Si on s’intéresse à l’intensité on pourra dire qu’elle est fonction des affinités électives qu’on a pu mutuellement identifier et partager et de la manière dont on a pu alimenter cette relation.
Avoir des personnes dans son réseau professionnel prêtes à « servir » quand on en a besoin, ça n’existe que dans des circonstances exceptionnelles et à la condition d’entretenir des liens forts. Si on ne réveille ces liens que pour solliciter ses interlocuteurs on est certain d’aller vers un échec et de perdre effectivement son temps.
Ces quelques lignes peuvent décoder pour le lecteur l’aspect comportemental et l’état d’esprit utiles à la réussite de sa participation dans un réseau. Je comprends bien qu’on passe d’habitude directement au « comment faire », sans se poser toutes ces question. C’est bien pour ça que les réseaux professionnels restent virtuels, souvent inopérants et que chacun les délaissent en condamnant le contenant sans même se préoccuper du contenu, lequel, pour l’essentiel, dépend de nous.
1 commentaire
En matière de réseaux dans la vie réelle, comme en ligne :
– il faut les construire petit à petit,
– on ne récolte pas le jour où on sème,
– on ne « fait » pas du réseau quand on en a besoin, car (1) c’est trop tard, (2) ça ne se fait pas, (3) « ça le fait pas » !
– le premier épisode est toujours la construction de la relation interpersonnelle.