Vendre son activité de conseil ou de formateur expose de plus en plus à l’exercice de la négociation. En effet, les offres font l’objet de discussions, d’une part du fait d’une concurrence sensible et d’autre part de la volonté des clients d’optimiser leurs dépenses.
Le consultant est donc confronté à la question délicate de l’amélioration de l’offre qui pourrait se résumer en une formule assez brutale : en donner plus pour un budget moindre.
D’où la nécessité de renforcer ses compétences de négociation commerciale. Impossible de réussir en se montrant naïf, intransigeant, influençable, sympa… Toute impréparation se paye cash. L’art de la négociation est une affaire d’anticipation, de méthode et d’état d’esprit. Appliqué au métier de consultant, l’art de la négociation respecte 3 conditions.
Négociation commerciale : l’offre doit atteindre sa cible
La clé pour discuter dans de bonnes conditions c’est d’abord que l’offre soit pertinente. Point essentiel : le client doit se dire : « le prestataire a compris notre besoin, nous a écouté, a pris en compte nos attentes, notre contexte et a su le traduire dans son offre. » Surtout si le cahier des charges était clair ou si l’expression du besoin a été argumentée lors des consultations préalables. Le client, pour être mis dans des conditions favorables de négociation commerciale doit « se retrouver » dans ce qu’il a reçu et qui devient objet de négociation.
Bref, l’inadéquation de l’offre en termes de contenu donne un rapport de force favorable au consultant pour entamer les discussions. Ce qui nous fait conclure que le premier talent de négociateur c’est sa compréhension et son expertise. Il ne faut pas l’oublier.
Négociation commerciale : la bonne qualité de la relation
Plus difficile à apprécier et souvent sous-estimée par certains acteurs : la qualité de la relation est un atout pour favoriser la négociation commerciale. Est-ce que lors des rencontres antérieures, un bon lien s’est construit ? Il s’agit là d’un mélange d’affinités, de reconnaissance, de confiance, de sentiment d’une bonne coopération. Une sorte d’envie partagée d’avancer ensemble qui se « tricote » avec le temps et qui confirme s’il en était besoin la profonde dimension humaine des compétences de négociation. Les efforts ressentis pour comprendre, pour s’investir, s’impliquer, prendre en compte la singularité d’une demande (le client, à plus ou moins juste titre croit toujours que son besoin est unique), le fait de se mettre à contribution, de donner des informations, de se montrer ouvert, tout en étant exigeant, tout cela participe à la construction d’une bonne relation. Le « courant doit passer » comme on dit en simplifiant les choses.
Il faut donner de soi d’abord si on veut plus tard recevoir, c’est-à-dire signer pour une prestation acceptée et correctement rémunérée.
Négociation commerciale : l’ajustement à l’offre
Pour qu’elle soit retenue, le client doit s’approprier l’offre. C’est sous cet angle qu’il faut voir les choses. C’est pourquoi les consultants qui viennent démontrer, justifier à l’excès le contenu de leur offre échouent si souvent (sauf avec quelques personnalités influençables qui trouvent à se rassurer dans un rapport dominant-dominé, c’est-à-dire maître-élève).
Sinon, la clé de la négociation commerciale tient à l’ajustement de l’offre dans le sens bien sûr d’une amélioration de celle-ci. C’est pourquoi nous disons aujourd’hui que les solutions négociées sont le fruit d’une démarche de co-construction. Le vrai ressort de la négociation devient alors la gestion de la marge de manœuvre sachant qu’il y a trois leviers (le troisième étant souvent oublié) :
- Le contenu proprement dit de l’offre,
- Le prix,
- Les effets induits.
Négocier en ce sens, c’est créer de la valeur en adaptant ensemble au mieux l’offre.
Cela revient à jouer avec :
- Les concessions possibles (des « avancées ») qui consistent à donner unilatéralement quelque chose (une remise de 5%, un délai supplémentaire de 8 jours, etc.) pour aller dans le sens du client.
- Les contreparties (de la monnaie d’échange) qui consistent à échanger, à « dealer » des éléments dont le troc arrange les deux parties (augmenter le montant d’un premier versement contre un allégement du budget global par exemple). Le jeu des contreparties est le fruit d’un grand pragmatisme et d’un esprit de coopération : on cherche ensemble à construire le meilleur arrangement.
- Les novations qui consistent à imaginer une amélioration inédite (effet d’aubaine) fruit de la discussion et souvent le résultat d’une vision décalée (pensée latérale) capable de faire la différence par son caractère inattendu et prometteur. La question n’est pas de savoir qui en a eu l’idée mais ce que l’opportunité apporte de nouveau, de différenciant (offrir un accès à des informations ou un contenu, faciliter la visite d’un site, etc.).
Améliorer l’offre c’est par conséquent l’adapter et l’enrichir en restant dans la marge de manœuvre que l’on s’est accordé (en fonction des enjeux et des rapports de force). C’est plus une affaire de créativité que de combat ou d’épreuve de force. Il s’agit de trouver la bonne combinaison pour « bouger les lignes » en actionnant concessions, contreparties et novations.
Cela revient aussi à rompre avec la guerre de tranchée sur le terrain du prix. L’épreuve de force à la baisse est le produit d’une conception appauvrie de la négociation commerciale. Trop de négociations relèvent d’une lutte sur des positions (l’un gagne, l’autre perd).
L’investigation par exemple dans ce que l’on a nommé les « effets induits » permet de mieux comprendre la valeur ajoutée d’une offre. On aurait tort de ne pas investiguer dans les « + » créés par l’offre une fois en place (conseil ou formation). Il s’agit d’ouvrir les yeux sur les avantages, les effets de levier, les chances de démultiplication, l’impact sur l’état d’esprit des acteurs concernés, leur capacité sans limite à bonifier, transformer les apports réalisés.
Le consultant bon négociateur sait donner du sens dans le temps à son offre.
Pour aller plus loin
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A propos de l’auteur
Lionel Bellenger est l’auteur de « L’autorité responsabilisante », un livre indispensable pour refonder l’autorité sur l’engagement et le respect.
Maître de conférences à HEC Executive Education, il a fondé la société IBEL (conférences et formations) dans le Val-de-Marne. Directeur de la collection « Formation permanente », il est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages concernant la négociation (« Les fondamentaux de la négociation », « La négociation (Que sais-je ?) », « Réussissez toutes vos négociations », la communication et le management.
Il a notamment écrit « Comment manager demain » chez ESF Éditeur, co-écrit avec Philippe Tramond – Dirigeant de Pilotis.
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Vous pouvez aussi le retrouver en vidéo sur internet :
- Sur le site Welearn (cours sur la négociation en ligne)
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Cet article a été diffusé une première fois en septembre 2016.