S’adapter aux diverses cultures managériales et à leurs effets sur les prises de décision fait partie des enjeux majeurs du consultant. Pour mieux comprendre les spécificités de chaque profil de dirigeant, nous vous proposons une série d’articles dédiés aux tendances managériales. Ce troisième article, après celui consacré au style directif et celui traitant du mode participatif et consensuel, éclaire les caractéristiques du leadership.
Les caractéristiques du leadership
Ce style de management se caractérise par une très forte orientation sur les résultats. Il s’inscrit dans un univers fortement concurrentiel, qui fait de l’esprit de compétition une des clés de la réussite. Au tournant des années 80, après les 30 glorieuses, l’économie s’est orientée vers une mondialisation des marchés et une lutte sans merci pour la conquête des parts de marché. L’économie s’est financiarisée et la recherche de la rentabilité (souvent à court terme) s’est imposée. Les dirigeants ont mis la pression en interne pour que les managers optimisent les résultats au moment où certaines ressources se raréfiaient. On est entré dans l’ère du « faire plus avec moins ».
L’autorité hiérarchique traditionnelle et le mode participatif et consensuel ont laissé la place à une nouvelle mentalité de managers obsédés par la performance. On a vu apparaître des profils de meneurs, volontaristes, mobilisateurs. Les discours moins fondés sur l’autorité (donner des ordres) sont devenus plus persuasifs. Ce management dans sa forme extrême qualifiée de « Wall Street management » est un management de haute pression qui cherche à faire monter en puissance une équipe. On a pu y voir aussi une connotation darwinienne, au sens où ce management se traduit par des pratiques élitistes : faire progresser, éliminer les plus faibles, garder les plus forts.
Ce management « haute pression » souvent inspiré des pratiques sportives de la haute compétition a pu créer des dégâts, des souffrances au travail. C’est peut-être dans les univers commerciaux ou dans la conduite de projets stratégiques (comme dans les centres de recherche des entreprises) que les effets pervers d’un management qui privilégie à l’excès la performance ont été les plus sensibles et le sont encore.
Ce management a obligé les entreprises à assurer une montée en compétence rapide des équipes, d’où un fort investissement en formation. Les rémunérations au mérite ont introduit de fortes différences au sein des équipes, mettant à mal parfois la cohésion. Le discours dominant est un discours de gagneur, de « guerrier ». Il faut « survivre ou mourir ». Beaucoup de managers de style leadership ont eu des changements à conduire, car il faut sans cesse s’adapter. Le leadership met en avant la réussite, la conquête, le gain des parts de marché. Le leadership est mis souvent à l’épreuve des cycles : les phases favorables d’expansion sont marquées par des crises, des ruptures et l’émergence de nouveaux leaders et de nouvelles équipes. Le management par la performance était annonciateur d’une période marquée par la précarisation du travail.
Profil du dirigeant en leader
Un nouveau type de forte personnalité a émergé. Le patron autoritaire ou « sympa » (style directif puis participatif d’avant) a laissé place à des managers engagés, combatifs, gagneurs qui tiennent leur légitimité fragile de ce fait, des résultats, du palmarès. Le maître mot c’est l’efficacité. Il faut se dépasser, s’investir. Ces managers privilégient le risque, l’audace. Leur force, ce n’est plus l’autorité, c’est un mental à toute épreuve. C’est pourquoi ils peuvent être durs, sans état d’âme. Ils pêchent souvent par une écoute défaillante. Leur leitmotiv : c’est l’effort. Quand on veut on peut.
Ce sont des hommes de « coup » ; ils vont au feu. Le défi est leur carburant. C’est pourquoi ils sont à la fois forts et fragiles, se montrent versatiles, instables. Ils influencent par contagion. Ils se montrent très « joueurs » dans leur mentalité. Certains protègent leurs équipes mais peuvent détester certains équipiers. Ils engendrent une euphorie stimulante ou une dépression contagieuse. Les résultats sont leur baromètre. Ils renforcent leur réputation et leur légitimité quand ils arrivent à redresser des mauvais résultats. A titre personnel, ils recherchent souvent « toujours plus » et sont attirés par des nouveaux défis. Ces managers vivent en permanence dans un fort système de tensions, parfois destructeur.
Conseils pour le consultant
Il convient de les consulter, de les faire parler de leur réussite et de trouver avec eux la bonne résonance si on veut influencer leur décision :
- Leur faire raconter leur mode de fonctionnement
- Ne pas chercher à les contrarier
- Les interroger sur le « comment » et moins sur le « pourquoi » de leur activité et leur management
- Tenir un discours d’exigence et d’engagement (ils aiment cela)
- Mettre en avant des gains d’amélioration, de performance
- Faire preuve de tonus (en général ils sont dynamiques)
- Leur proposer une expérience qui prouvera quelque chose
- Ne pas craindre de proposer un tarif élevé, cela les sécurisera
- Leur parler d’expériences réussies chez des clients à leur image
- Vanter les mérites de figures du leadership (d’hier comme J. Welsh chez G.E. et d’aujourd’hui comme E. Musk chez Paypal et Tesla)
- Montrer qu’on s’intéresse à la réussite
Retrouvez le préambule de Lionel Bellenger, à propos de cette série d’épisodes :
Les autres tendances managériales :
- Profil de dirigeant : le mode commandement
- Profil de dirigeant : le mode consensuel
- Profil de dirigeant : L’autorité responsabilisante
A propos de l’auteur
Lionel Bellenger est l’auteur de « L’autorité responsabilisante », un livre indispensable pour refonder l’autorité sur l’engagement et le respect.
Maître de conférences à HEC Executive Education, il a fondé la société IBEL (conférences et formations) dans le Val-de-Marne. Directeur de la collection « Formation permanente », il est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages concernant le management, la communication et le développement personnel.
Il a notamment écrit « Comment manager demain » chez ESF Éditeur, co-écrit avec Philippe Tramond – Dirigeant de Pilotis.
1 commentaire
« Leadership is communicating to people their worth and potential so clearly that they come to see it in themselves » Stephen R. En lisant l’article au vue de la définition précédente,nous comprenons mieux pourquoi les entreprises françaises ont tant de mal à fédérer leurs salariés et pourquoi ces derniers prennent autant de médicaments. Je suggère aux personnes intéressées par le sujet d’abandonner les auteurs français qui n’ont, semble-t-il, absolument rien compris à la question.