Aujourd’hui, nombreux sont les responsables d’entreprises et notamment les DRH qui s’interrogent sur les bonnes pratiques qu’il conviendrait de développer pour organiser les missions confiées à d’ex-salariés ayant liquidé leur retraite. Avant de répondre à cette préoccupation sur le travail des retraités, nous examinerons dans le détail les risques que présentent cette situation tant du point de vue juridique que socioéconomique. Puis, nous dresserons le cahier des charges auquel doivent répondre les différents statuts possibles. Enfin, nous indiquerons les principales pistes connues et pratiquées avec notamment l’intérim et surtout le portage salarial.
Les risques juridiques et les difficultés socio-économiques du travail pour retraité
Nous avons vu dans un article précédent que l’emploi des jeunes retraités est un plus pour les entreprises. Cependant, certains risques sont liés au travail ou à la mission confiés, au statut choisi qui lui-même est dépendant du contexte social de l’entreprise et de la personne.
En tout premier lieu, il convient d’étudier la nature du travail ou de la mission envisagée afin de savoir s’il est question pour la personne choisie de donner des ordres ou (et) d’en recevoir. Si l’exercice d’un lien de subordination est nécessaire, il convient en second lieu de savoir s’il s’agit d’une situation d’emploi classique relative à une mission ponctuelle (moins de 18 mois) ou durable.
Dans le cas d’une mission ponctuelle
Son caractère exceptionnel devra être défini. Les contrats de mission qu’il sera possible d’envisager seront alors :
- le CDD, Contrat à Durée Déterminée,
- l’intérim,
- le portage salarial.
Chacune de ces trois formules utilisées dans ce contexte, appelle des commentaires que nous trouverons ci-après dans une matrice reprenant les différentes conditions.
Si la mission est de plus de 18 mois
Toujours dans un contexte de lien de subordination, le nombre des formules accessibles se réduit :
- le CDI, Contrat à Durée Indéterminée,
- le portage salarial pour une mission de moins de trois ans.
S’il n’y a pas de lien de subordination
Dans ce cas, il s’agit d’une prestation liée à un besoin ponctuel dans le cadre classique de l’entreprise ou d’un appel à ressource spécifique pour renforcer une équipe projet. Pour ces situations, la plupart des statuts peuvent être envisagés pour l’intervenant :
- un contrat de travail : CDD ou CDI suivant la durée de la mission,
- l’intérim,
- le portage salarial,
- le statut d’indépendant : auto-entrepreneur, profession libérale, société.
En conclusion, la bonne connaissance de la nature de la mission est donc essentielle pour choisir le statut de l’intervenant retraité : il est conseillé de la définir avec précision et de ne pas hésiter à être redondant si nécessaire ainsi qu’à en préciser les différentes conditions, tant en plein qu’en creux.
Le cahier des charges des statuts possibles pour une mission en retraite
Si la nature de la mission est un déterminant du statut choisi, on constate que dans tous les cas, les possibilités de choix restent plurielles.
Comment trancher entre ces différentes possibilités de statuts ?
Le retour au travail d’une personne ayant liquidé sa retraite peut être apprécié de diverses manières par les autres salariés ou par les partenaires sociaux selon la culture sociale de l’organisation. Dans les milieux où l’on pratique le management par projets ou dans les services de R & D, ces dispositions sont courantes et acceptées comme nécessaires. Par contre, dans des organisations plus classiques ou marquées par des réductions récentes d’effectifs, le réflexe de protection jouera naturellement et la décision sera plus facilement stigmatisée. Le choix du statut dans ce contexte ne sera pas neutre !
Pour anticiper ces difficultés, lorsqu’elles sont prévisibles ou quand un doute existe, il est vivement conseillé d’éviter les missions floues dont le terme est incertain. Là également, la définition de la mission revêt une importance majeure car elle permet d’envisager une communication préventive qui désamorcera les réactions de défense.
Le terme d’une telle mission, ne devrait pas excéder trois ans pour deux raisons. La première est qu’un CDI présente le risque de voir le salarié rester en poste jusqu’à 70 ans, la seconde est que l’emploi d’une personne au-delà de 65 ans est culturellement très difficile à faire accepter dans tous les cas.
Le contrat de travail n’est que rarement la meilleure formule pour ces raisons mais aussi parce que dans le cas d’un CDI, le salarié peut
réclamer une indemnité liée à son ancienneté en cas de licenciement. Lors de la liquidation de sa retraite, il n’a perçu qu’une indemnité de départ en retraite. Celle-ci n’exonère pas l’entreprise du versement d’une indemnité d’ancienneté en cas de rupture d’un contrat de travail dans la période qui suit, laquelle pourrait reprendre alors la totalité des années travaillées dans l’entreprise.
Le CDD serait plus approprié, mais là le risque est lié à la conformité du motif. Si le salarié doit terminer une mission commencée sous son ancien statut, il y a toutes les chances pour que cette reprise d’activité consécutive à la liquidation de sa retraite ne soit pas recevable au titre d’un surcroît temporaire d’activité.
Un nouveau contrat de travail avec l’ancien employeur n’est donc pas la meilleure des solutions. Elle est souvent utilisée lorsque le remplacement du salarié ne coïncide pas avec son départ.
Quelles différences entre l’intérim et le portage salarial ?
Dans ce cas, deux autres solutions que les classiques contrats de travail peuvent être utilisées :
- l’intérim,
- le portage salarial.
Pour ce qui est de l’intérim
Les difficultés seront les mêmes que celles présentées par le CDD. Cette formule ne pourra donc être utilisée que dans le cas d’un changement de cadre (service, département, établissement) et avec l’argument du surcroît temporaire d’activité.
Reste le portage salarial…
Il semble le mieux adapté d’autant plus que son encadrement législatif est en bonne voie suite au récent discours de manuel Valls suivi par l’adoption de l’amendement 89 relatif au portage salarial par l’assemblée nationale. Il présente par ailleurs de nombreux avantages pour les seniors comme nous l’expliquions dernièrement dans cet article.